Quels problèmes pose la production alimentaire sous sa forme actuelle ?

La production alimentaire nécessite d’importances ressources en eau, en énergie et en terre. Nous consommons les ressources naturelles plus rapidement qu’elles ne peuvent se régénérer. Le dernier Jour du dépassement, autrement dit le jour où l’humanité a épuisé toutes les ressources que la nature peut renouveler en un an, a été atteint le 29 juillet 2019, ce qui n’a jamais été aussi tôt. En outre, l’usage de pesticides nuit à la biodiversité et à la santé.

La production alimentaire est également vulnérable à l’impact croissant du changement climatique. La hausse des températures entraîne des précipitations abondantes qui dégradent les terres, un manque d’eau et l’érosion des sols, ce qui affecte les récoltes et en diminue le rendement.

L’agriculture verticale, une solution possible

Qu’est-ce que l’agriculture verticale ? Comme son nom l’indique, l’agriculture verticale (AV) consiste à superposer des étages de cultures dans des espaces fermés. L’AV cherche à optimiser les conditions de croissance de chaque plante et à les appliquer dans un environnement contrôlé et entièrement automatisé. Elle permet de maximiser le rendement et de minimiser l’impact environnemental. Les fermes verticales sont particulièrement adaptées aux herbes aromatiques et aux légumes à feuilles qui ne poussent pas trop haut, ni trop profondément dans le sol. En d’autres termes, l’agriculture verticale offre la possibilité de superposer un grand nombre d’étages de plantes dans un bâtiment, ce qui en fait une méthode de culture plus efficace en termes de coûts que l’agriculture traditionnelle.

La première ferme verticale d'Écosse

Chez Aberdeen Standard Investments, nous estimons que la recherche sur le terrain et l’engagement direct sont essentiels pour saisir l’ensemble des tenants et aboutissants d’une entreprise, d'un secteur ou d’une tendance d’investissement.

C’est dans cette optique que nous avons visité la première ferme verticale d'Écosse mise au point par Intelligent Growth Solutions (IGS), une agritech innovante créée en 2013.

En 2018, IGS a construit sa première installation pilote qui lui a permis de développer et de breveter une plateforme révolutionnaire basée sur l’Internet des objets, qui met à contribution l’intelligence artificielle pour identifier les conditions de croissance optimales des plantes.

La ferme verticale se compose de quatre tours de 40,8 m2 dans un bâtiment industriel qui occupent une surface au sol d’environ 250 m2. Elle est complétée par une aire de service. Chaque tour peut accueillir quelque 50 plateaux. La configuration rappelle un système d’entreposage automatisé, simple à construire et à remplacer.

 

IGS a développé un système qui gère individuellement chaque plateau. Chaque plante a son propre algorithme d’optimisation et tout est contrôlé depuis une application mobile. Les besoins en eau, lumière, température et humidité sont déterminés de manière précise et à la minute près sur l’ensemble du cycle de croissance des plantes.

 

Cette installation de pointe est hébergée au James Hutton Institute, leader mondial de la recherche sur les plantes, les cultures, les sols, l’utilisation des terres et l’environnement, ce qui permet à IGS de profiter de l’expertise en science végétale de l’institut. Cela signifie aussi qu’IGS peut participer à des projets qui faciliteront le développement de la technologie et démontreront la modularité de l’AV avec en point de mire, la possibilité de déployer le concept à l’échelle mondiale.

Quels sont les avantages de l’agriculture verticale ?

L’agriculture verticale présente des avantages significatifs par rapport à l’agriculture traditionnelle.

  • Utilisation des sols. L’AV utilise beaucoup moins de surface au sol que l’agriculture traditionnelle. Dans la ferme verticale d’IGS, chaque tour occupe seulement 12% de la superficie que nécessiteraient des cultures extérieures similaires. Il est également possible de reconvertir des bâtiments désaffectés pour l’agriculture urbaine (par exemple, un ancien abri aérien à Londres).
  • Eau. L’AV nécessite beaucoup moins d’eau que l’agriculture traditionnelle dans la mesure où il y a moins d’évaporation et où l’eau peut être facilement recyclée. La ferme d’IGS dispose d’un système d’irrigation en circuit fermé, autrement dit, l’eau de pluie est recueillie, utilisée et recyclée, ce qui permet d’économiser 95% d’eau.
  • Résistance au changement climatique. L’AV contribue à renforcer la résistance au changement climatique de la production locale. En effet, les cultures peuvent pousser toute l’année, indifféremment de la fréquence croissante des événements climatiques extrêmes, sécheresses et inondations.
  • Culture toute l’année. La culture est possible 365 jours par an, le nombre de cycles de culture annuels est donc bien supérieur à celui de l’agriculture traditionnelle. L’agriculture verticale offre également la possibilité non négligeable de faire pousser plus rapidement des plantes plus résistantes.
  • Consommation d’énergie. L’agriculture verticale combinée aux énergies renouvelables produit une combinaison extrêmement efficace, puisqu’elle ne nécessite pas de charge de base en continu et peut faire face à l'intermittence. Les tours peuvent stocker l’énergie et en prélever dans le réseau si nécessaire.

L’énergie peut également s’avérer problématique dans la mesure où pour fonctionner, une ferme verticale consommera plus d’énergie que l’agriculture en extérieur. Chez IGS, la climatisation et l’éclairage de chaque plateau nécessitent environ 1 kilowatt d'électricité. Il est donc essentiel d’optimiser l’efficacité énergétique. La ferme verticale d’IGS fournissant uniquement la lumière dont les plantes ont besoin, elle est plus efficace en énergie et en coûts que d’autres méthodes de culture en intérieur, notamment les serres.

Outre les besoins en énergie, l’AV fait face à d’autres problématiques. Seules quelques cultures sont adaptées à l’AV, mais le champ des possibles s’élargira au gré de l’évolution technologie. Les coûts de démarrage et les frais courants peuvent être élevés. Il y aussi le fait que l’AV peut sembler « artificielle » aux yeux de certains. Une nouvelle fois, nous sommes convaincus que ces problématiques s’atténueront à mesure que le secteur gagnera en maturité, que le soutien politique se renforcera et que les atouts de l’AV deviendront plus apparents.

Où en est l’agriculture verticale, quelle est sa croissance attendue ?

L’AV en est à ses balbutiements, mais pourrait modifier les modes de culture, notamment dans les régions qui connaissent une croissance démographique rapide et une forte urbanisation, qui ont des surfaces limitées et qui sont très vulnérables au changement climatique et à la pénurie d’eau. Selon IGS, le marché mondial de l’AV progressera au rythme de 24% par an au cours des trois prochaines années.

L’agriculture verticale en est à ses balbutiements, mais pourrait changer nos modes de culture.

Son adoption plus large serait extrêmement bénéfique dans les régions les plus arides, notamment au Moyen-Orient et en Afrique. Elle est également adaptée aux pays de petite taille très urbanisés tels qu’Israël, Singapour, le Japon, Taïwan et les Pays-Bas. Par ailleurs, l’AV pourrait être utile là où les sols sont épuisés et la pollution très élevée, mais où la demande pour des aliments de qualité est forte. Ce serait le cas dans certaines régions de Chine.

L’exploitation du potentiel de l’AV nécessitera le soutien des pouvoirs publics, notamment par le biais d’une stratégie claire sur la manière dont l’AV s’intègre aux politiques nationales. La collaboration des parties prenantes et la sensibilisation joueront un rôle essentiel. En parallèle, les investissements privés et publics seront nécessaires et opportuns. Compte tenu du volume de capitaux disponibles, ces investissements pourraient permettre de réaliser d'immenses progrès en termes d’optimisation, de déploiement et de baisse des coûts.

Qu’est-ce que cela signifie pour les investisseurs ?

Les investisseurs se doivent de connaître les développements de l’AV, la technologie sur laquelle elle repose et les avantages qu’elle offre en matière de durabilité et ce, pour plusieurs raisons. En effet, la révolution de l’AV produira sans doute des gagnants et des perdants. Il est donc essentiel de comprendre les risques et les opportunités de ce secteur en plein développement. Ces connaissances peuvent ensuite être intégrées dans les décisions d’investissement et sous-tendre l’engagement auprès des entreprises concernées.

Dialoguer avec les entreprises qui sont impliquées dans l’AV ou qui s’y intéressent pourrait permettre d'obtenir de précieux renseignements sur le potentiel de croissance de ce secteur. Cet engagement fournit également une indication sur les opportunités qui s’ouvrent aux entreprises cotées qui sont exposées à une agriculture plus durable.

Il est également possible d'investir directement, par exemple, en finançant des sociétés privées innovantes qui développent la technologie et les algorithmes permettant d’optimiser les cultures. Les investisseurs peuvent également acheter les bâtiments abritant des fermes verticales en tant qu’actifs réels.

En conclusion

La manière dont nous cultivons les sols pour produire des aliments n’est pas durable en termes de terre, d’eau et d’énergie. Toutefois, l’agriculture verticale représente une façon innovante de produire des aliments de meilleure qualité, de manière plus efficace et plus écologique. Avec le bon investissement et le bon engagement, l’AV pourrait finir par devenir la méthode de production alimentaire de choix des générations futures.

Pour regarder l’intégralité de la vidéo sur la ferme verticale d’IGS, cliquez ici.